Le XVIIIème siècle fut une époque très riche dans le domaine social, politique, économique, philosophique mais également dans l’évolution des mentalités et des arts. En littérature, toutes les possibilités romanesques sont explorées et le roman libertin en est un genre bien spécifique.
On connait généralement l’empirisme des Lumières qui, au nom de la Raison et de valeurs morales bien définies, ose dénoncer les oppressions de l’époque. De même, les libertins ont un esprit critique ; la sensation apparait comme la principale source de la connaissance et se situe en opposition avec les préjugés et dogmatismes religieux et moraux. Placée sous le signe de la liberté, cette connaissance du plaisir est d’abord envisagée sous un angle empirique et pratique, ce qui permet ensuite de la corroborer par la théorie. Il y a ainsi une corrélation très étroite entre les mouvements des corps et ceux des idées.
Car, de cette sensation, les libertins en donnent une version érotique en mettant en scène les fantasmes de leurs personnages avec l’idée également de faire fantasmer les lecteurs. Il s’agit de mettre à jour la nature profondément hédoniste de l’homme ; la morale traditionnelle en prend un coup !
Pseudo-mémoires ou pseudo-confessions, toujours intimiste, sinon intime, le procédé très souvent utilisé consiste pour une personne, après les quelques mise en garde d’usage, à conter les aventures d’une autre personne qui évolue dans la galanterie ou s’avère être beaucoup plus licencieuse. On ne saurait alors reprocher au « je » qui écrit de relater les expériences d’un autre « je ». Il arrive également que la fin du récit se moralise où, après connu mille turpitudes, le « héros » décide de se ranger dans une vie sans soupçon.
La Collection « Bouquins » réuni ici un florilège diversifié et très intéressant de cette production libertine. On y retrouve de la passion, des études des mœurs, de la légèreté et une liberté de penser et d’agir. Le tout est servi par un style qui, probablement, (et de mon point de vue en tout cas) a pu atteindre au XVIIIème siècle une qualité, une distinction et une musicalité qu’il n’avait pas connu au préalable et qu’il n’a pas retrouvé depuis ou trop rarement. La langue est belle et scintillante, le style magnifiquement maitrisé et si ces romans sont avant tout axés sur le désir et le plaisir, ils n’en oublient aucunement la beauté et le chatoiement de la narration. De quoi s’offrir quelques heures de lecture singulièrement savoureuses !
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