Ce roman n’est pas le plus connu de Maupassant et cependant, quel beau livre et quel plaisir de lecture !
Certes, l’intrigue n’a pas grande originalité mais elle est magnifiquement exploitée. On connait Maupassant dans sa capacité à fouiller les cœurs et les âmes. Là, on peut presque dire qu’il se surpasse. La psychologie du héros se dessine parfaitement, depuis ses résistances avec la peur en ombre sous-jacente jusqu’à son semi anéantissement qui résiste du mieux qu’il le peut et en passant par les espoirs chimériques qu’a faire naitre un instant « d’égarement » de la Belle qui l’a séduit. On le suit dans toutes ses interrogations, ses doutes, ses souffrances.
La Belle en question est magnifiquement décrite dans cette ambigüité permanente où, comme le héros, on ne cesse de s’interroger : est-elle redoutablement égocentrée et manipulatrice ou est-elle tout à fait sincère et authentique dans son incapacité à donner autant que ce qu’elle reçoit ? Est-elle juste une frivole qui ne fonctionne que dans le mental et le paraitre ou s’est-elle transformée en handicapée sensorielle pour se protéger et ne plus souffrir ?
Tout autour virevoltent divers « seconds rôles », bien dessinés et réagissant en fonction non d’eux-mêmes mais des codes des milieux sociaux dans lesquels ils évoluent. Thématique classique chez Maupassant mais servie encore une fois par un style et une syntaxe qui font de chaque phrase un régal de lecture.
« Notre cœur » apparaît à certains égards presque comme une autre facette de « Une vie » ou s’opposent et s’enchevêtrent obligations sociales, désirs de l’âme et du corps, tempêtes du cœur, espoirs insensés mêlés de détresse, de doute, d’abandon. L’analyse des rapports humains, matinées ici d’un sentiment d’attraction/répulsion, est d’une finesse exemplaire.
Tout pourrait se résumer dans une des dernières pages, quand le héros découvre l’abandon innocent et sincère d’Élisabeth et se pose la question de nombre de personnes : « Ah ! Une femme qui serait ces deux-là, qui aurait l’amour de l’une et le charme de l’autre ! Pourquoi ne trouve-t-on jamais ce qu’on rêve, et ne rencontre-t-on toujours que des à peu-près ? ». Tout porte à croire qu’il sera avec l’une ce que l’autre est avec lui. N’y a-t-il pas d’amour heureux ?…..
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